En 2004, Ingrid Agbato quitte le Bénin afin de poursuivre ses études en Santé Environnementale et Santé au Travail à Montréal. Déjà passionnée de couture, elle doit laisser à contrecœur sa machine à coudre derrière elle : « On avait une limite de 32 kilos de bagages et avec le froid du Canada, tu priorises les cols roulés ! ». Il y a tout de même dans ses valises quelques étoffes colorées de son pays natal, des vestiges qui de fil en aiguille dessineront son parcours entrepreneurial.
Coo-Mon (@coomonaetc) propose une ligne d’accessoires pour hommes, femmes, bébés et enfants : nœuds papillon, cravates, mouchoirs de poche, ceintures, foulards, serre-têtes, chouchous, bavoirs, et plus encore.
Si Ingrid s'est d’abord intéressée à la couture pour confectionner ou modifier des vêtements à sa guise, ses tissus africains deviendront ici un moyen de partager son bagage béninois avec sa fille. Elle affectionne particulièrement la confection d'accessoires, car ces touches de couleurs s'intègrent facilement à la mode occidentale. La créatrice a commencé à travailler avec le wax, un tissu de coton ciré emblématique du continent africain, avant d'intégrer le madras de la Guadeloupe, le Shweshwe d’Afrique Du Sud et le brocart chinois. Elle aimerait ajouter le Chita du Brésil à sa sélection et continuer de parcourir le monde à travers les textiles.
Coo-Mon est en effet pour sa créatrice un véhicule culturel : « Mon objectif est de créer de la curiosité, pas seulement des accessoires. Utiliser la mode pour communiquer, partager et faire découvrir d’autres cultures. Si on peut faire du beau en mélangeant des tissus multi-ethniques et occidentaux, pourquoi on ne pourrait pas s’entendre dans la vraie vie ? ». Elle espère contribuer au déclin des préjugés et promouvoir l’ouverture d’esprit.
Ingrid souligne et apprécie d’ailleurs l’aspect multiculturel de sa ville d’adoption. En regardant autour d’elle à l’atelier, elle nous fait remarquer que l’un des designers avec qui elle partage le local vient du Vietnam, un autre de l’Algérie, un de Québec... « Je dis souvent que Montréal, c’est un endroit pour voyager à travers le monde sans mettre les pieds à l’aéroport », dit-elle. Le nom Coo-Mon, est d’ailleurs une fusion entre le code IATA de l’aéroport de Cotonou au Bénin (COO) et Montréal.
Quand on touche à la délicate question de l’appropriation/appréciation culturelle, l’entrepreneure pense que la solution est de faire participer et profiter la culture qu’on souhaite valoriser. Il est pour elle tout à fait possible que la démarche prenne la forme d’une rencontre plutôt que d’une exploitation à visée pécuniaire. À ses yeux, le respect des traditions et la transmission des savoirs sont clés. C’est la scientifique qui conclut sur le sujet : « Quand tu pioches dans le travail de quelqu’un d’autre, tu mets la référence ». Pour sa part, elle fournit avec chaque achat un feuillet informatif, précisant l’origine du tissu.
La marque s’inscrit aussi dans le mouvement du slow fashion, avec ses petites productions réalisées presque entièrement sur demande, l’usage de tissus recyclés ou certifiés OEKO-TEX, la revalorisation de ses retailles, ainsi qu’en offrant la livraison à vélo et en réduisant les déchets dans ses opérations.
Ingrid perçoit la Semaine Mode de Montréal comme un moment de valorisation de la mode québécoise. Elle en profitera pour présenter ses nouveaux accessoires de l’automne et offrir des rabais à sa communauté. Pour ne pas manquer ça, suivez Coo-Mon sur les réseaux sociaux !
CRÉDITS :
Entrevue et texte par Caroline Sobral Cabana, révision par Jhan Boyer Gignac
Photo de couverture : Coo-Mon